Depuis 10 ans, Alexandre Oppecini, auteur et metteur en scène de Main dans la Main, dirige la Compagnie Spirale basée en Corse à Bastia. Ses pièces traitent de sujets d’actualité comme T-Rex, les joies de l’open space ou Les Parallèles, qui se jouera à la Scala au festival off d’Avignon, sur la difficulté des rencontres amoureuses. Avec Main dans la Main , on retrouve la thématique de l’amour dans un couple homosexuel.
La pièce s’ouvre sur une scénographie épurée de Lucie Joliot : un unique banc noir, un sol noir recouvert de paillettes à peine visibles et au fond un rideau avec un néon qui va changer de couleur selon les ambiances. Ce décor dénudé suffit pour nous faire voyager dans l’espace et dans le temps : le banc devient lit d’hôpital, bar, canapé… Sur ce banc lit d’hôpital est couché Manu (Nathanaël Maïni) qui, avec son compagnon Paul (Fabien Ara), a été victime d’une violente agression homosexuelle parce qu’ils se tenaient la main dans la rue.
Toute la pièce est habilement construite sans aucun temps mort sur les allers et retours entre le présent, la chambre d’hôpital où Manu va peu à peu émerger de son coma, et le passé, les sept souvenirs, couleurs de l’arc en ciel, de leur histoire d’amour compliquée, mouvementée et tendre. En effet, tout semble les opposer. Paul, la trentaine, souvent alcoolisé et sous substances chimiques, apparemment sûr de lui et fier de son homosexualité, écume les soirées gays parisiennes, enchaîne les histoires d’amour sans lendemain, refuse l’engagement, la vie de couple hétéronormée. Manu, au contraire, a quitté sa Corse natale pour cacher son homosexualité à ses proches, est plus réservé, il tombe amoureux de Paul et souhaiterait vivre avec lui.
Le sujet pourrait paraître banal et rebattu mais Alexandre Oppecini a le mérite de traiter du couple homosexuel à l’heure où, contrairement à ce qu’on pourrait penser, les agressions homophobes sont en constante augmentation. Mais il aborde aussi un sujet universel : la difficulté de vivre à deux, l’amour, le besoin de liberté.
Servi par les deux excellents comédiens, Alexandre Oppecini a réussi l’exploit de le traiter avec sérieux mais aussi avec un beaucoup d’humour. On est touché, ému mais on rit aussi beaucoup. Les jeux de mots, les répliques crues, comiques fusent sans aucune vulgarité. Le décor dénudé met en valeur le jeu très physique, très émouvant et drôle des acteurs.
Un spectacle militant tout public (à partir de l’adolescence) de grande qualité à voir pour passer un très bon moment.
Frédérique Moujart
Jusqu’au 27 juin les lundis et mardis à 19h30 au théâtre du Marais, 37 rue Volta. Paris 3ème- Réservation : 01 71 73 97 83 ou www.theatredumarais.fr
Des militants partagent ici des critiques littéraires, musicales, cinématographiques ou encore des échos des dernières expositions mais aussi des informations sur les mobilisations des professionnels du secteur artistique.
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