L’album « Splendour of Blood » de la vocaliste Marjolaine Reymond ouvre plusieurs pistes et posent des questions sur notre place dans le monde, notre aller-retour perpétuel entre passé et futur pour construire notre identité. Les mémoires du passé sont présentes, ici le judaïsme dans toutes ses incomplétudes musicales et les musiques dites contemporaines du groupe des Six – à commencer par Germaine Taillefer que l’ordre alphabétique rejette à la fin, mais aussi Darius Milhaud dont les accointances avec le jazz sont connues – à Luciano Berio, lui aussi influencé par le jazz, le free cette fois, toutes ces traces sont utilisées pour construire une voie inédite, une sorte de synthèse pour construire la bande son du présent, un présent tourmenté, bousculé. Christophe Monniot, saxophoniste – sopranino pour cet opus – est responsable des arrangements pour composer un écrin à la voix. Un septet, un sextet, deux quintettes et un quatuor à vent pour les interludes partagent l’environnement de la chanteuse.
L’amour fou, forcément fou – hors l’amour passion, pas d’amour – peut-il offrir une utopie pour ce monde engoncé dans la marchandise ? C’est le thème partagé des poésies reprises en un ensemble qui projette d’autres significations comme les références bibliques, « Sang Passion » pour le bouillonnement, « Sang Genèse » pour introduire les débats enflammés, « Sang Sacrifice » pour les renoncements liés à la passion et « Sang Éternité », pour un amour qui ne saurait finir.
Un chant étrange qui semble à la fois surgir du passé et s’engage dans l’avenir. Comme si toutes les mémoires, du passé et du futur, faisaient corps pour secouer une torpeur de mauvais aloi. Il faut écouter Marjolaine Reymond, une voix capable de marier toutes les voix.
Nicolas Béniès
« Splendour of Blood », Marjolaine Reymond, Label Kapitaine Phœnix/L’Autre Distribution
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