Une petite fille shoote dans la soucoupe d’une mendiante assise « sur sa couverture qui pue » envoyant les pièces valser aux alentours. Sa mère lui demande de s’excuser, lui explique que cette femme vient de loin. Mais la fillette refuse puisqu’elle n’a pas fait exprès et que la « soucoupe était au milieu du passage ». Sa mère s’excuse auprès de la mendiante, ramasse les pièces et prive la petite fille de sa chocolatine du goûter. La petite fille ne supporte pas trop son petit-frère et l’enverrait bien valser lui aussi. Et puis pourquoi ses parents mangent-ils une pizza alors qu’elle a dû auparavant se contenter de petits pois-carottes ? Enfin il y a tous les enfants de sa classe et cette Safira la Syrienne qu’elle n’aime pas. La révolte contre l’injustice qu’elle a subie et la honte qui la ronge vont faire d’elle une méchante fille. Elle ira à nouveau shooter dans la sébile d’un réfugié, mais volontairement cette fois. Elle ne craint plus les accusations, puisque le monde est plein d’injustices. Et puis avec ses boucles blondes, elle est « un petit peu la France ».
Le texte de Pierre Notte, qu’il met aussi en scène, est un petit bijou. Les préoccupations des enfants sont là – l’envie d’être avec les grands, la jalousie et l’envie de tuer le petit frère – mais aussi « tout ce qui énerve » ou le goût des mots défendus. Ce n’est absolument pas mièvre, c’est drôle, empli d’une ironie qui peut être féroce.
Antonio Interlandi est cette petite fille. Torse nu, vêtu d’un long tutu rose, baskets au pied, il bavarde sans cesse et parle très vite. Il est formidable. Il ne singe pas une petite fille et pourtant quand il trottine, virevolte ou quand il s’énerve ou s’interroge on la retrouve. Il a le rythme du discours des enfants qui ont trop à dire et que leur réflexion peut mener à des déductions perverses. L’enfance n’est pas toujours un monde de contes de fées !
Micheline Rousselet
Jusqu’au 10 décembre au Théâtre La Flèche – 77 rue de Charonne, 75011 Paris – Réservations :
01 40 09 70 40 – les vendredis à 19h
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