Le 75e anniversaire du débarquement a suscité une débauche de manifestations pour glorifier la Libération. La musique a été oubliée de même qu’un travail de mémoire pourtant toujours utile. Plutôt que de rechercher des héros – notre Président aime beaucoup ce petit jeu – il aurait été préférable de parler de morts des jeunes gens échoués sur ces plages. La mer était rouge de leur sang versé. Ou du racisme de la hiérarchie militaire américaine qui ne craint pas de condamner à mort des soldats noirs accusés d’exactions ou même de viols et d’acquitter des blancs responsables des mêmes chefs d’accusation. Louis Guilloux racontera son expérience des cours martiales dans « OK Joe ». Nelly Kaplan, dans « L’interprète », conduira l’enquête pour rendre hommage au romancier.
Ou musique. La musique, le jazz, est en train, une nouvelle fois, de bouleverser le paysage. La musique qui arrive, qui débarque est celle de l’orchestre de Glenn Miller. Le chef lui est mort le 15 décembre 1944 au-dessus de la Manche. Pas seulement. Les Gis ont des V-discs, les disques de la Victoire proposés par la radio des Formes armées américaines pour le moral des troupes, des disques hors-commerce destinés à être détruits mais incassables et récupérés par les collectionneurs. Toutes les disciplines artistiques représentées, Opéra, théâtre, Variétés… Et le jazz. Frémeaux et associés, en 4 CD, offre un échantillonnage de cette production. Il est à saluer la réunion de cette somme rarement proposée. De quoi nager sur la période 1943-49 marquée par la grève des enregistrements, jusqu’en 1944 pour les grandes compagnies. Un travail de mémoire essentiel.
Nicolas Béniès
« Les disques de la Victoire, American Army V-Discs 1943-49 », livret de Jean-Baptiste Mersiol, Frémeaux et associés/Mémorial de Caen.
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