La collection « Quintessence » dirigée par Alain Gerber (Frémeaux et associés) fait toujours la preuve d’un choix affiné dans la présentation d’un artiste partie prenante des mondes du jazz. La collaboration de Alain Tercinet pour la présentation des plages est toujours aussi vitale autant pour l’amateur que pour le néophyte. Le dernier né de la collection est consacré à Woody Herman qui n’a jamais eu la reconnaissance, au moins en France, de son talent au moins, de son génie si l’on suit la présentation de Gerber. Le coffret de deux CD a plusieurs mérites dont le moindre n’est pas de redonner vie à Tercinet, disparu à 80 ans le 30 juin 2017. Un cadeau inespéré.

Pour le contenu, la découverte des orchestres successifs de Woody, mort ruiné par ses comptables et managers. Il les avait appelés « Herd », troupeau. Sauf le premier : « The Band that plays the Blues » – osé, non ? -, comme pour s’excuser il avait déclaré : « c’est ce qu’on fait de mieux » ! Hormis pour les racistes, le blues transcende la couleur de la peau. Avec l’orchestre qui joue le blues, il avait réalisé son plus grand succès. Pour la petite histoire, ce fut un orchestre coopératif. Et Woody a été élu chef d’orchestre… Maladie dont il n’arrivera pas à se soigner. Une élection à vie en quelque sorte. Mais il ne l’a jamais su…

Stan Getz, le soliste principal du premier troupeau, avait pour habitude de dénigrer les talents d’instrumentiste du chef, saxophoniste alto surtout – un peu ténor, un peu soprano vers la fin – et clarinettiste dans la lignée des clarinettistes des grands orchestres. A écouter cette sélection qui couvre, pour le premier CD, les années 1939-1954 et deux versions de « Four Brothers » la marque de fabrique du « Herd » dès 1947, et pour le deuxième les années 1954-1962, on aperçoit la mauvaise foi du ténor vedette.

L’instrument principal de Herman reste l’orchestre qu’il fait « sonner » sans faire penser à aucun autre ou, plus exactement en prenant à tous les autres pour forger un son particulier. Woody et ses jeunes arrangeurs ne reculent devant aucune limite. Igor Stravinsky écrit, après la seconde guerre mondiale, pour eux qui s’approvisionnent aux sources du be-bop et des compositions de Charlie Parker. Chronologiquement c’est le premier orchestre be-bop que ce « first herd ».

Nicolas Béniès

« Woody Herman, New York, Hollywood, Monterey, 1939-1962, collection Quintessence, Frémeaux et associés


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