1962, en Haïti. Un homme, Clairvius Narcisse, est ramené d’entre les morts pour être envoyé de force dans l’enfer des plantations de canne à sucre.
2008, Melissa, une orpheline haïtienne, arrive dans le prestigieux pensionnat de la Légion d’Honneur au règlement d’un autre âge et doit pour être admise dans le groupe fermé dont Fanny est la leader, confier à ses futures amies le secret qui hante sa famille.
Elle ne pouvait se douter que la révélation de ces mystères tournant autour de la culture vaudou allaient persuader Fanny, en proie à un chagrin d’amour, à commettre l’irréparable.
Après « Saint Laurent » et « Nocturama » Bertrand Bonello a éprouvé le besoin de rompre avec la super production qui nécessite trois années pour aboutir.
Mais si « Zombi child » est un film financièrement modeste et s’il s’est fait dans l’urgence de la nécessité de retrouver le maniement de la caméra, il n’a manqué de rien et c’est la passion du cinéma, le désir de tourner de Bertrand Bonello qui ont compensé un budget raisonnable.
Et c’est sa virtuosité de réalisateur qui lui a permis d’aborder (mais à sa façon et dans un cheminement narratif très personnel) le film de zombi, un genre cinématographique à la fois mystérieux et galvaudé.
« Zombie » est l’orthographe américaine du mot alors que « Zombi » est celle correspondant à une figure profondément inscrite dans la culture d’Haïti et qui a résulté d’un usage mauvais du Vaudou.
Le zombie américain est un vrai mort alors que le Zombi haïtien est suspendu entre la vie et la mort.
Clairvius Narcisse, le grand père de Mélissa, même si les avis sont partagés à son sujet, serait mort en 1962 avant de revenir dans le monde des vivants.
« Zombi » est un film de contrastes. A tel point qu’il semble avoir été le résultat de la juxtaposition à priori hasardeuse de deux histoires qui resteraient étrangères l’une à l’autre si la rencontre des personnages de Mélissa et de Fanny ne les reliait et si la mise en scène virtuose de Bertrand Bonello, fluide, n’en imposait le rapprochement
Toutes les séquences de la partie relatant la vie des jeunes pensionnaires de l’institution de la Légion d’honneur sont en dépit du fonctionnement d’une autre époque du règlement de l’établissement, résolument contemporaines avec des comportement et langage des adolescents, très actuels.
Alors que les séquences tournées à Haïti qui sont le reflet d’une culture et de croyances ancestrales s’apparenteraient à la mythologie des grecs et à un imaginaire polythéiste.
L’établissement de la Légion d’honneur strictement réservé à accueillir des jeunes filles dont un membre de la famille a été honoré par cette distinction existe toujours, situé à Saint-Denis ; il a été fondé par Napoléon à peu près au moment de l’indépendance d’Haïti.
Bertrand Bonello a réussi, dans un film d’une grande fluidité, à donner à la fois un portrait d’une grande justesse de l’adolescence dans tout ce qu’elle peut avoir de débordant et d’excessifs et à aborder le mystère d’une culture ancestrale, à accorder au film de zombi un nouveau regard…
Superbe.
Francis Dubois
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