Maria et Olivier, deux trentenaires multi-polyglottes se rencontrent à Taïwan, tombent amoureux l’un de l’autre et vivent sans attendre un vrai conte de fée. Mais alors que tout semble sourire aux deux jeunes gens, la maladie survient, frappant Olivier de plein fouet, obligeant le couple à rejoindre Strasbourg où il existe un service hématologique parmi les plus pointus au monde. La force de l’amour et de la complicité qui unissent les jeunes gens vont-ils être suffisants pour franchir tous les obstacles que la maladie finit par dresser entre eux ?
Romain Cogitore réussit magnifiquement l’introduction de cette rencontre atypique de deux êtres singuliers, polyglottes, trouvant dans la pratique des langues rares un moyen de communication singulier.
Les premières scènes ouvrent sur une histoire d’amour habitée d’une force prodigieuse qui ira jusqu’à faire reculer la mort mais qui, par ailleurs garde toute la fragilité, la vulnérabilité des sentiments les plus forts.
« L’autre continent » est d’abord la chronique d’un amour hors-norme entre deux personnes qui parlent une langue qui n’est pas la leur, qui choisissent de s’exprimer dans tel ou tel idiome selon qu’ils ressentent tel ou tel sentiment. Comme si l’état amoureux permettait à la fois de dépasser les frontières en même temps qu’il se nourrit de toutes sortes de nuances extrêmement délicates et fragiles.
Olivier peut pratiquer quatorze langues et sa particularité première est de les ranger chacune dans un lieu, un contexte précis. C’est une science qu’il pratique selon une théorie qui se partage entre pragmatisme et poésie.
On a très envie que le film se poursuive sur cette lancée mais au contraire de ça, Olivier tombe malade et bientôt sombre dans un comas profond et toutes les pistes lancées dans la première partie du récit ne mènent plus à grand chose et même si Romain Cogitore se défend d’avoir réalisé un film sur la maladie pour s’attacher essentiellement à l’histoire d’un couple, en réduisant Olivier à une perte de connaissance, il sacrifie son film.
Tout ce qui rendait le récit singulier et attachant sombre dans le mélo même si les règles en sont bousculées, avec la guérison quasi miraculeuse d’Olivier, dans le constat des séquelles de la maladie, dans une dislocation du souvenir.
Alors que le film disposait des atouts pour déboucher sur une œuvre singulière, le réalisateur le fait basculer dans la banalité.
Était-il nécessaire d’introduire dans le récit les personnages des parents qui n’ont par ailleurs aucune consistance, de multiplier et d’étirer les séquences explicatives avec le grand patron qui suit le cas d’Olivier comme il nous impose le scène de la robe de mariée souillée pour annoncer que le mariage ne se fera pas ?
On est passé à deux pas d’un film fort et original.
Cependant, il reste quelques belles séquences, la belle présence de Deborah François et peut-être surtout de Paul Hamy, jeune comédien charismatique qui donne merveilleusement et naturellement à Olivier ce mélange de force et de vulnérabilité.
Francis Dubois
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