Deux frères et une sœur autour de la cinquantaine vont et viennent, discutent de tout et de rien pendant que de l’autre côté du couloir, leur vieille mère agonise. La conversation les conduit au bout de la banalité des propos échangés à des révélations sur eux-mêmes, à lever le voile sur de petits secrets, sur les non-dits qui ont peut-être bien chargé et faussé leurs passés.
Tour à tour graves ou rieurs, ne résistant pas à faire un bon mot, à lancer une boutade, à prendre une revanche sur l’autre, à réveiller une vieille querelle, peut-on lire dans leur propos allant du coq à l’âne , un élan d’amitié ou de réelle fraternité ?
Si, en 2016, dans ce même théâtre du Rond-Point, avec le spectacle« Couple» écrit de sa plume et mis en scène par ses soins, Gilles Gaston-Dreyfus faisait preuve d’une certaine qualité d’écriture et d’un sens de la mise en scène, il est beaucoup moins convaincant avec son nouveau spectacle « Veillée de famille » . Le canevas de la pièce pas très original n’attendait qu’à se trouver renouvelé par l’écriture, un regard neuf sur une situation et des personnages qui devaient rendre toute sa complexité à la situation où la prochaine mort de la mère est censée les plonger.
Or, l’écriture des dialogues fonce tête baissée dans tous les pièges que tendait cette situation particulière que chacun vit à sa façon, l’un en masquant le désarroi du deuil prochain, donnant le change avec une certaine désinvolture, l’autre en plongeant dans une sensibilité extrême, ou encore un autre, en laissant voir une distance certaine entre deux moments d’émotion.
Si Gilles Gaston -Dreyfus, qui semble se plaire dans la certitude que son texte est irrésistible, cabotine à souhait, l’habituelle magnifique comédienne Dominique Reymond est ici méconnaissable de minauderies et de grimaces.
Un tel ratage d’interprétation interroge. Comment un comédienne habituellement aussi inspirée qui nous a habitués à des interprétations subtiles, d’une grande intelligence, peut-elle se perdre dans un jeu aussi maniéré ? La réponse est peut-être bien dans le fait que l’auteur de la pièce ne lui a donné aucun personnage à défendre et que sans limites, celui-ci égare son interprète en débordements
Stéphane Roger qui interprète l’autre frère s’en tire mieux, soit que son personnage soit plus construit, soit qu’il ait opté pour un jeu sobre qui l’expose moins.
« Veillée de famille » est un texte de surface d’une fausse sincérité qui croit avoir décroché la lune avec quelques insolences de langage et des moments d’émotion dictée par un soucis de rupture de ton.
Francis Dubois
Théâtre du Rond Point
2bis av Franklin D. Roosevelt
75008 Paris
Réservations (partenariat Réduc’snes tarifs réduits aux syndiqués Snes mais sur réservation impérative) : 01 44 95 98 00
www.theatredurondpoint.fr
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