A la faveur d’une tempête de neige, Eva femme troublante et mystérieuse fait son entrée dans la vie de Bertrand, un jeune écrivain prometteur. Cette rencontre va bouleverser la vie du jeune homme jusqu’à l’obsession et le faire glisser jusqu’à sa perte.
Benoît Jacquot a eu la bonne idée d’adapter le roman éponyme de James Hadley Chase même si avant lui, Joseph Losey en avait tiré un très beau film avec Stanley Baker et Jeanne Moreau dans le rôle d’Eva.
Benoît Jacquot qui avait réussi il y a quelques années, un remake du film de Luis Bunuel « Le journal d’une femme de chambre» autrefois joué par Jeanne Moreau, s’en était plutôt bien tiré en se démarquant de son prestigieux aîné. Lea Seydoux, dans une toute autre tonalité de présence et de jeu avait succédé sans laisser de plumes à la grande Jeanne Moreau.
Le genre policier, qu’il traite avec délicatesse, une sorte de souplesse narrative et sans trop jouer sur la corde du suspense va bien à Benoît Jacquot.
Le film serait sans doute un beau film (au sens esthétique comme dans le déroulement de la narration) s’il ne souffrait (excusez du peu) de ce qui pourrait revenir à une erreur de casting.
Isabelle Huppert est la grande comédienne qu’on sait mais dans certains de ses derniers films, elle se renouvelle si peu que ses nouvelles participations finissent par apparaître comme des «copier-coller» de certaines de ses prestations précédentes.
Heureusement que Serge Bozon et Hong Sangsoo viennent à point pour remettre notre grande actrice sur le rail de partitions moins attendues.
Même si l’ombre de Losey plane sur le film de Benoît Jacquot, si celle de Jeanne Moreau menace la partition d’Isabelle Huppert, ce nouvel «Eva» se regarde et fournit ici et là de belles raisons de se .réjouir.
Un des atouts du film tient à la présence de Gaspard Ulliel. On se souvient de son interprétation du personnage d’Yves Saint Laurent dans le film de Bertrand Bonello, de sa magnifique performance dans « Juste la fin du monde» adaptation de la pièce de Jean-Luc Lagarce par Xavier Dolan qui lui avait valu un prix d’interprétation largement mérité.
Il est, dans « Eva », simplement somptueux et si le personnage de jeune écrivain est sensé exister dans l’ombre de celui d’Eva, c’est tout le contraire qui se passe. Il occupe tout l’écran et il réussit, avec la plus grande discrétion de jeu, une magnifique, une solaire et attachante performance.
On pourra aller voir le film de Benoît Jacquot et pourquoi pas dans la foulée, la reprise prochaine en salles (le 14 mars) du film de Joseph Losey?
Francis Dubois
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