Samia a fui son pays et se retrouve dans un Paris inconnu avec une adresse en poche, celle peut-être obsolète d’un garçon originaire de son village. Mais Samia est hantée par l’idée d’être retrouvée par son frère, un religieux radicalisé qu’elle a dénoncé aux autorités pour harcèlement. Elle est provisoirement recueillie par Imad avant d’échouer chez Leila, une bourgeoise tunisienne argentée qui l’emploie à son service. Entre Samia, Imad et Leïla, le désir et la peur vont exacerber les tensions.

Cinéma : corps étranger
Cinéma : corps étranger

Raja Arami caressait depuis longtemps le projet de réaliser un film sur l’immigration mais elle voulait aborder ce thème brûlant hors des traitements habituels, hors des sentiers battus.

Sa Samia n’est pas une immigrée ayant quitté son pays du Maghreb pour des raisons économiques ou politiques. Elle a quitté la Tunisie pour des raisons plus intimes, pour échapper aux pressions religieuses d’un frère et pour vivre pleinement une autre vie à laquelle elle aspire mais sans connaître le chemin qui l’y conduira.

Samia est une battante qui a compris que, sous peine de misère durable et d’asphyxie, un immigré est tenu de se lancer à l’assaut géographique et social du pays d’accueil.

Samia est à la recherche d’une implantation territoriale (obtention de papiers, d’un travail, de la recherche d’un réseau relationnel) en même temps qu’elle part à la découverte d’autres domaines comme la sexualité, les désirs et ses pulsions de jeune femme.

Samia arrive à Paris avec un passé chargé, une épée de Damoclès au-dessus d’elle, mais avec des ambitions.

Les personnages qui vont l’aider à se dégager de son passé sont deux immigrés comme elle mais tous deux déjà différemment implantés en France.

Pourtant si Imad émigré récent et Léïla intégrée depuis longtemps en France interviennent socialement dans son intégration, c’est surtout à son épanouissement intime qu’ils vont contribuer, à la vraie découverte de son corps et à sa familiarisation avec le désir.

«Corps étranger » est un film ambitieux dans la mesure où il mène de front l’universel (la condition des immigrés) et l’intime.

Mais si, à travers le parcours de ses trois personnages principaux, le film aborde outre les sujets de l’immigration, de l’intégration, ceux du désir, du rejet, du radicalisme et de la trahison, le cœur du sujet est beaucoup plus universel et touche à la complexité des êtres humains, ce qui tisse chez lui le désir ou le rejet, ce qui les attire les uns vers les autres et ce qui les éloigne.

Quelque soit le sujet abordé dans le film qu’on choisit comme essentiel « Corps étranger » est avant tout un film courageux où le corps et le désir qui l’habite ont toute leur place.

Francis Dubois


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