Hannah vit seule depuis le jour où elle a accompagné son mari dans la prison où il purge une peine à la suite d’une condamnation dont la raison sera révélée à la fin du récit. Elle est dans le déni total, piégée à la fois par son aveugle fidélité conjugale, son sens du dévouement et son manque de confiance en elle. Elle se réfugie dans un quotidien qu’elle maintient en l’état, rythmé par le soin méticuleux qu accompagne le moindre acte, la régularité des gestes et le battement des habitudes.

« Hannah» dresse le portrait intime d’une femme vieillissante mais encore belle dont la vie bascule après l’arrestation de son mari.

Cinéma : Hannah
Cinéma : Hannah

La mise en scène d’Andrea Pallaoro est au plus proche du personnage, tellement proche qu’on sent tout au long du film, une sorte de vigilance protectrice de la part du regard de la camera à l’égard d’Hannah tant sont accompagnés le moindre de ses gestes et chacune de ses allées et venues.

Le film dévoile avec de douces précautions et une grande pudeur les indications qui lèvent le voile sur les raisons de l’incarcération du mari.

Le récit repose sur une observation attachée à un seul personnage, une démarche qui isole Hannah à tel point qu’elle permet à quiconque de pouvoir s’identifier au personnage ou à l’histoire.

« Hannah  » est une sorte de recherche à définir les frontières entre l’identité individuelle et l’identité sociale réduite à celle d’un couple.

Pourquoi Hannah, lorsqu’elle se rend chez ses enfants avec cadeaux et gâteau est-elle rejetée par son fils alors que son petit fils lui réserve un accueil chaleureux ?

Que contient la mystérieuse enveloppe qu’Hannah découvre scotchée au dos d’une armoire qui a été déplacée à l’occasion d’un dégât des eaux ?

C’est en faisant le rapprochement entre l’accueil détestable que son fils lui réserve quand elle se présente chez lui et la présence secrète de l’enveloppe qui pourrait contenir des pièces à conviction compromettantes que le mystère s’estompe.

Que représente, en dépit du désert de solitude où vit Hannah, cette persistance avec laquelle elle conserve intact un quotidien poussé jusqu’à l’habitude d’un bouquet de fleurs hebdomadaire, alors que le personnage pourrait se laisser aller à la dépression ?

C’est peut dire que le film d’Andrea Pallaoro repose essentiellement sur le personnage d’Hannah et sur l’interprétation de Charlotte Rampling qui doit à chaque instant nourrir de silence et d’émotion, une authenticité au plus proche de cette solitude à la fois assumée et à chaque instant combattue.

De la précision de chaque geste, de chaque attitude, de chaque regard presque opaque naît une autre sorte d’aventure, l’aventure quotidienne, cette sorte d’épopée intime qui entraîne dans un univers où chaque instant est nourri d’une force nulle et pourtant presque aventureuse.

Ce film est un véritable tour de force tant du point de vue du sujet abordé, de la discrétion, la pudeur avec lequel il est conduit que de la force de l’interprétation de Charlotte Rampling.

Francis Dubois


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