Hanna, mère et grand mère d’une soixantaine d’années, semblait ne plus attendre grand chose de la vie. Elle s’était résignée et docilement mise au service de ses deux fils immatures et de leurs familles.
Mais le jeu du hasard va en décider autrement et opérer un tournant dans le vie de la sexagénaire avec des rencontres décisives qui amèneront les personnages satellites de l’histoire à rechercher une vérité sur eux mêmes et à prendre du recul.
La rencontre d’Hanna avec un vieux nageur anticonformiste prénommé Brona va lui faire voir la vie sous un angle différent, la conduire à modifier ses perspectives et à établir une complicité inattendue avec un petit fils introverti.
Elle va prendre du recul vis à vis de ses enfants qu’elle assistait servilement et dont les relations conjugales se détériorent.
Pour Hanna, il ne sera pas trop tard pour changer de cap.
L’univers des piscines, les berges de la Moldau hivernale ou les bords de l’étang Bolevak, la nage en eau glacée constituent la toile de fond de l’histoire d’Hanna.
L’arrivée tonitruante de Brona dans sa vie, personnage à la fois rassurant, imprévisible et complètement atypique, va bouleverser tout le paysage familial de la vieille dame, susciter la méfiance de ses enfants qui craignent de voir un futur héritage leur passer sous le nez.
Brona, bien qu’ éprouvé par la vie, reste un homme plein de vitalité.
Il fait preuve d’originalité et de cette fantaisie vivifiante jusque là totalement absente de l’univers d’Hanna.
C’est une sorte de cow-boy sans chevaux qui loge dans une caravane, entouré de poules et partage sa passion de l’eau glacée avec un groupe d’amis gourmands de la vie auprès desquels Hanna va trouver une sorte de famille de substitution, apaisée, chaleureuse et entraînante.
«Ice mother» est la rencontre heureuse de deux mondes, de deux sphères diamétralement opposés.
Dans son nouveau film, Bohdan Slama poursuit son auto analyse authentique des relations sentimentales et sociales dans la famille et plus largement entre des individus que le hasard met en présence.
Il aborde, en parallèle, différents autres sujets et notamment celui de l’infantilisation de certains adultes comme un problème de civilisation entraînant l’environnement familial et social dans des relations toxiques souvent dévastatrices, celui de l’enfance victime des manquements des adultes à assurer la mission parentale
«Ice mother » pourrait être simplement la «love story» de deux seniors mais Bohdan Slama nourrit son récit d’excroissances narratives et l’enrichit d’atmosphères inédites qui éloignent le film de tout cliché réducteur. Et c’est peut-être en montrant sans détours un rapport sexuel entre deux amants sexagénaires qu’il donne une tonalité inédite à sa réalisation.
Une œuvre originale et résolument optimiste. Une revisite salutaire et sous un autre éclairage du monde du troisième âge…
Francis Dubois
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