A quinze ans, Sarah reprend un entraînement intensif de patinage sur glace au Club de Colmar où sa mère a emménagé pensant que sa fille y atteindrait un niveau tel qu’il lui ouvrirait les portes de sélections prestigieuses.
Sarah retrouve le rythme exténuant des entraînements et des compétions sans savoir si elle fait ça pour elle ou pour faire plaisir à sa mère qui, ne rêvant que de championnats et d’un avenir glorieux, redouble d’exigences à son égard.
Sarah retrouve à son arrivée à Colmar les rivalités entre filles, la tyrannie d’un entraîneur pas très psychologue et la violence des compétitions.
Tandis que son corps est mis à l’épreuve de la glace, ses désirs d’adolescente l’éloignent petit à petit de ses ambitions sportives.
On imagine, à son comportement, que la mère de Sarah a ambitionné elle-même une carrière de patineuse qu’elle n’a pas pu mener à terme et qu’elle met, pour remédier à sa frustration, tous ses espoirs dans la réussite de sa fille.
S’improvisant coach, elle charge sans s’en rendre compte l’adolescente d’une lourde responsabilité, et en oublie d’être pour elle autre chose qu’une mère exigeante. Une insistance qui finit par installer entre elles deux un climat de tension où les sentiments filiaux finissent par ne plus avoir leur place.
Le film de Lila Pinell et Chloé Mahieu est un documentaire sur les conditions de vie de ces adolescents sportifs soumis à des rythmes infernaux. Ils subissent des cadences, entre entraînements, rencontres, courses à la performance, exigences des clubs, qui se justifieraient à peine même dans le cas où ce serait pour eux une véritable passion.
Mais le film traite aussi de l’environnement que constitue le club exigeant et du climat familial qui se détériore au fur et à mesure que les échéances se précipitent.
Entre les adolescents, la compétition conduit à créer des rivalités, des tensions, des mesquineries et à détériorer des relations inhérentes à l’âge qui devraient être propices aux amitiés exclusives, aux premiers flirts, à la construction de l’individu en devenir.
Lila Pinell et Chloé Mahieu construisent avec justesse une histoire exemplaire, celle de Sarah qui a la lourde charge d’être «l’espoir de son club».
Les dures conditions imposées à de jeunes personnes sont-elles formatrices ou destructrices ? L’entraîneur doit-il être un partenaire, un accompagnateur ou quelqu’un d’intransigeant ? Les parents doivent-ils rester en retrait ou entrer dans la spirale des exigences ?
Autant de questions qui peuvent nourrir de passionnants débats.
« Kiss and cry » est l’endroit où, après avoir terminé leurs programmes, les patineuses attendent le verdict du jury. C’est le lieu symbolique de l’environnement dans lequel le film évolue, plus propice aux larmes qu’aux embrassements….
Un film au plus près de son sujet…
Francis Dubois
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