Trisha Brown a beaucoup contribué à l’évolution de la danse contemporaine en défiant la loi de la gravité.
En inventant un déséquilibre inédit, elle a insufflé à ses danseurs une fluidité de mouvements sans précédent.
Une de ses plus célèbres chorégraphies « Glacial Decoy» entre au répertoire du Ballet de l’Opéra de Paris.
Le film de Marie-Hélène Rebois rend compte du travail de transmission de Lisa Kraus et Caroline Lucas, deux collaboratrices très proches de Trisha Brown et de leur présence auprès d’un groupe de danseuses de l’Opéra.
L’enthousiasme des deux chorégraphes marchant dans les pas de Trisha Brown, leur énergie, l’admiration qu’elles portent à leur initiatrice, immerge le spectateur dans le mouvement novateur de la chorégraphie le plus représentative de son école…
Le film pose la question du caractère éphémère d’une chorégraphie et de la survie de l’œuvre après la disparition de l’artiste qui en est à l’origine mais « Dans les pas de Trisha Brown » est également une immersion dans le travail à l’intérieur du Studio de l’Opéra Garnier.
Marie-Hélène Rebois en réalisant des films sur Dominique Bagouet, Merce Cunningham et maintenant Trisha Brown qui marquèrent chacun à jamais l’histoire de la danse, et aujourd’hui décédés, aura contribué à laisser une trace concrète de leur travail et de précieux documents de référence.
Un autre relais avec les artistes disparus est assuré par l’empreinte indélébile laissée dans le corps des interprètes.
Et en l’espace de cinq films depuis 1993, la réalisatrice a montré comment construire avec la mémoire du corps et avec l’oubli.
On pourrait penser que «Dans les pas de Trisha Brown», dont l’essentiel tourne autour d’un travail de reconstitution d’une chorégraphie, ne consiste qu’en une suite d’exercices répétitifs et ne peut intéresser que des amateurs de danse ou qui auraient une connaissance plus ou moins approfondie des chorégraphies.
C’est peut-être l’impression qu’on peut avoir au début du film. Mais très vite, lorsque commence à prendre corps l’ossature du travail, et que la technique se transforme en mouvement artistique, que les costumes apparaissent et que la fluidité des mouvements des danseuses surgit comme par magie, on est fasciné .
L’intérêt est dans la fascination qu’opère un travail de répétition mais bientôt aussi dans l’impatience d’assister à l’objet chorégraphique abouti.
A moins que d’être totalement réfractaire à la danse, on devrait trouver du plaisir à assister à cette longue mise en place de moments qui, lorsqu’ils constituent le puzzle final, apparaît comme une vraie récompense !
Francis Dubois
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