Yves Zand, un réalisateur français, s’apprête à tourner un film sur la chanteuse Barbara.
L’actrice qui s’apprête à l’interpréter s’imprègne du personnage fantasque et souvent imprévisible de la célèbre artiste. Elle travaille les postures, la voix, les partitions, le piano, les regards jusqu’à se laisser submerger par son modèle, jusqu’à ne faire qu’une avec elle, à parvenir à un phénomène de mimétisme, une presque parfaite superposition des deux visages.
Pendant ce temps, le réalisateur travaille sur les documents d’archives, sur la musique et se laisse emporter par son admiration pour l’une et l’autre.
Les deux femmes se confondent au point qu’on peut se demander de qui le film d’Yves Zand est le portrait : celui de Barbara immortalisée par tant de chansons intemporelles, femme secrète et ténébreuse, ou celui de Jeanne Balibar, l’interprète sublime.
De l’une et de l’autre assurément…
On imagine que si Mathieu Amalric a choisi de réaliser un film sur Barbara, c’est qu’il porte à la chanteuse une admiration particulière. Mais ne serait-ce pas aussi parce qu’il avait flairé la ressemblance entre Jeanne Balibar et Barbara qu’il a repris ce projet que Pierre Léon voulait réaliser depuis plusieurs années sans y parvenir.
Il offre à celle avec qui il partagea sa vie un rôle à la mesure de son talent, en sachant qu’elle serait celle qui, par son talent, sa finesse de comédienne, relèverait le défi de façon superbe.
Mathieu Amalric s’est complètement éloigné du biopic classique et même dans la préparation du film qu’il projette de faire, Yves Zand, son double, ne semble pas répondre aux règles de cet exercice en vogue dans la production cinématographique depuis maintenant plus d’une une décennie.
De nombreux documents d’époque retracent la carrière de la chanteuse depuis ses débuts à « l’écluse » , célèbre cabaret Rive-Gauche jusqu’à ses passages dans les salles les plus prestigieuses et des tournées où elle connut un immense succès. Et si on approche Barbara dans des moments intimes inattendus qui reflétaient sa nature fantasque, si la caméra rôde autour de la demeure qu’elle possédait en Seine et Marne, le mystère du personnage reste intact…
Le film d’Amalric est un hommage à deux femmes d’exception qui apparaissent en miroir jusqu’à la ressemblance physique.
Et même si la carrière exigeante de Jeanne Balibar au cinéma et au théâtre ne l’a jamais placée au rang d’une reconnaissance du «grand public» le talentueux cinéaste en fait avec ce film où elle éblouit, une icône dont la splendeur rend pâlichonnes toutes les stars du moment du cinéma français.
A tous points de vue, dans sa construction, dans les subtilités du scénario, dans la magie d’une mise en scène troublante et enchanteresse, dans l’image, les lumières, le chatoiement des étoffes, le film de Mathieu Amalric est un travail d’orfèvre, un magnifique ouvrage de dentelle fine…
Superbe, superbe superbe !
Francis Dubois
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