retour_a_forbach.jpg Régis Sauder revient à Forbach, trente années après avoir quitté la ville. Il est resté sur un souvenir mitigé de son enfance au cours de laquelle il a souffert d’être mal ressenti par les autres enfants du quartier de Wiesberg auprès de qui, en tant que fils du directeur d’école, il apparaissait comme un privilégié au regard des autres. Il a quitté Forbach pour se reconstruire et plus tard, lorsqu’il a été installé dans la vie, il s’est posé la question de savoir, entre démons de l’extrémisme, fermeture des usines, chômage et désertification de la ville, comment vivent ceux y sont restés.

Avec «Retour à Forbach», Régis Sauder poursuit son exploration des zones de non-droit qu’il avait entamée avec «Nous, Princesses de Clèves» situé dans les quartiers Nord de Marseille.
Les sujets qu’il aborde, les cadres qu’il choisit où il situe ses documentaires, sont plutôt liés à une proximité qu’à un souci de suivre une ligne thématique.
Pour «Nous, Princesses de Clèves», il a tourné dans un lycée de Marseille qu’il connaissait bien, où son épouse a enseigné pendant quinze ans.

Ici, il revient dans la ville où il a vécu jusqu’à la fin de son adolescence, qu’il a quittée avec un sentiment d’inachèvement, de culpabilité, voire de trahison. Et il ne revient pas en simple visiteur mais comme cinéaste avec le projet de réaliser un documentaire qui rendra compte de l’état de Forbach, une ville de l’Est qui a connu, au fil des années de bouleversements politiques et sociaux importants. En 2014, au moment des élections municipales, Forbach s’est retrouvée sous les feux des projecteurs à cause d’un score record du FN, arrivé en tête.

La fermeture des houillères de la région a considérablement modifié la physionomie de la ville. La première conséquence, avec le chômage galopant qui a suivi, a été le départ de nombreux habitants, la désertification des quartiers ouvriers, le spectacle désolant des volets clos des maisons abandonnées. La vente de la maison familiale, à la fin du film rejoint en parallèle l’image de la ville qui se vide même si, pour ce qui est de l’habitation familiale, il y a de nouveaux occupants, et parmi eux des enfants dont la présence représente une continuité.
L’autre conséquence a été, en réaction, la montée du vote FN qui suscite les questionnements et les craintes pour l’avenir, ou dans certains cas des certitudes.

Régis Sauder partage son film entre des images de la ville accompagnées de textes qu’il dit en off, qui racontent autant qu’ils révèlent ses souvenirs, ses sentiments et restituent quelques entretiens qu’il a eus avec des habitants dont certains sont des amis d’enfance. Une patronne de bar qui n’a pas sa langue dans sa poche dont les propos savoureux font état de la situation sociale et politique de Forbach. Une institutrice passionnée qui, en plus de sa charge d’enseignante, donne des cours d’alphabétisation à des migrants. Un homme modeste et cultivé chargé de famille qui s’accommode bien de sa vie à Forbach… Des hommes et des femmes qui apportent, chacun, un éclairage sur l’histoire récente de leur ville.

On ressent dans sa façon de filmer, d’interroger et d’écouter les habitants, que Régis Sauder voudrait, avant de partir pour toujours, régler un contentieux, qu’il est coupé en deux, partagé en son attachement aux lieux et le constat que la ville a fait un choix politique qui le dérange profondément et avec laquelle, à ce titre là, il aurait des comptes à régler.

Si «Retour à Forbach» fait référence au passé, c’est aussi un film qui parle du présent et qui ose anticiper sur un futur incertain. Une nouvelle librairie vient d’ouvrir à Forbach. Est-ce le signe d’une prochaine renaissance ?

Un peu fouillis dans sa construction, mais sensible et attachant.
Francis Dubois

AGENDA DES PROJECTIONS
* Séances en présence du réalisateur Régis Sauder
* MONTPELLIER, Cinéma Utopia, lundi 24 avril à 20h
* AVIGNON, Cinéma Utopia, mardi 25 avril à 20h
* LORGUES, Ciné Bleu, mercredi 26 avril à 20h
* MARTIGUES, Cinéma le Renoir, jeudi 27 avril
* SIX FOUR LES PLAGES, Ciné Six N’Etoile, vendredi 28 avril à 20h30
* PORT DE BOUC, Cinéma le Méliès, mardi 2 mai en partenariat avec Image de ville
MARSEILLE, Cinéma les Variétés, mardi 9 mai à 20h, en partenariat avec Image de ville, Pensons le matin et la Maison de l’Architecture et de la Ville PACA. Séance animée par André Jollivet : président de la MAV.
* GARDANNE, Cinéma 3 Casino, lundi 15 mai
* NIMES, Le Sémaphore, jeudi 15 juin, en partenariat avec le Conseil d’Architecture, d’Urbanisme et de l’Environnement du Gard


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