Sur l’île canadienne de Cap-Breton, Blaise et Nessa, deux jeunes marginaux se débattent avec leur dépendance à la drogue.
Ils vivent de petits boulots, et essentiellement grâce à une tondeuse à gazon qu’ils possèdent et traînent derrière eux à longueur de journée, de la tonte des pelouses autour des habitations cossues.
Ils font du porte-à-porte pour proposer leurs services contre quelques dollars mais leur marginalité qui se lit sur eux au premier coup d’œil, ne favorise pas l’embauche.
En quête de stabilité, le jeune couple s’inscrit à un programme de sevrage à la méthadone.
Tandis que Nessa, plus volontaire, se bat pour s’en sortir, Blaise s’approche dangereusement du point de non-retour.
Dans son film, Ashley Mckenzie trace le portrait de deux jeunes êtres déglingués par la vie et que la société méfiante, marginalise encore chaque jour un peu plus.
Les deux protagonistes se sont engagés dans une telle impasse, qu’il y a peu d’issue possible à leur situation.
Un piège s’est refermé sur eux et il sera difficile de sortir de la spirale dans laquelle ils sont engagés.
Les causes et les effets se rejoignent et le rejet dont ils sont les victimes, tant de la part des administrations dont ils sont tributaires, que des particuliers auxquels ils proposent leurs services, les enfoncent dans leur marginalité.
Le film d’Ashley Mckenzie fait l’autopsie de cette déchéance annoncée.
Comment Blaise et Nessa en sont-ils arrivés là ? Quelle a été le moment où ils se sont engagés sur la pente qui allait les conduire à leur chute ?
Ashley McKenzie a choisi, au début du film, de présenter ses deux personnages avec une suite d’images morcelées ne montrant que rarement la totalité de leur corps.
Une présentation éclatée de leurs personnes pour mieux rendre compte de l’état de dislocation des individus, de leur mental brisé, de la difficulté qu’ils éprouvent à chaque fois un peu plus pour rassembler les morceaux d’eux-mêmes et faire face.
Le film montre bien comment malgré le malaise, l’inconfort, l’humiliation, la fatigue jusqu’à l’épuisement, l’instinct de vie persiste même si les personnages ont parfois, dans la lancée, des airs d’automates.
Comment la vie peut fonctionner en roue libre et par quel élan mystérieux, on peut dans les pires conditions, continuer à mettre un pied devant l’autre pour avancer.
Et cela, malgré l’absence totale d’objectif, sans la motivation du moindre but à atteindre.
« Werewolf » est un film dur dont l’atmosphère est parfois irrespirable.
Et le constat qui en résulte, l’absence totale de précaution narrative peuvent avoir valeur de mise en garde.
Une projection de « Werewolf » face à un public de jeunes adultes, peut amener à un débat sur la drogue, la dépendance à la drogue, le mécanisme de marginalisation des individus, les raisons qui peuvent amener quelqu’un à sombrer.
En cela, le film d’Ashley Mckenzie, à condition qu’il fasse l’objet d’une préparation, peut être un excellent terrain d’approche de sujets brûlants.
Une œuvre forte.
Francis Dubois
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