Le premier plan du film de Claire Simon montre, en plongée, l’entrée dans l’enceinte des bâtiments de la FEMIS, d’une foule de jeunes gens venus participer aux Portes Ouvertes organisées par la prestigieuse école qui prépare aux métiers du cinéma.
Ils seront plus d’un millier à plancher dans le grand amphi de Nanterre sur les épreuves écrites qui constituent la première étape du concours.
Pour ceux qui auront franchi ce premier obstacle, il y aura deux autres épreuves qui consisteront en des exposés face à des jurys constitués par des professionnels du cinéma.
Sur les 1200 candidats au départ, soixante seulement accéderont à une formation qui fera d’eux les prochains réalisateurs, scénaristes, monteurs, exploitants de salles, distributeurs…
Un candidat au concours d’entrée à la FEMIS n’est pas tout à fait un postulant comme un autre et les membres du jury face auxquels ils se trouveront au moment des oraux ne sont pas non plus des professionnels comme les autres.
Les candidats, dans la plupart des cas, ont fait leur choix avec une motivation toute particulière. Ils ont généralement découvert le cinéma très tôt et pour la plupart, sont devenus des cinéphiles avertis. Celui qui se destine à la réalisation et celui qui vise une carrière de distributeur, s’ils ont fait des choix différents, ont en commun la passion du cinéma.
Les membres du jury qu’ils auront en face d’eux ont généralement la même passion pour le cinéma, mais chacun en a une vision personnelle.
Comment un candidat va-t-il parvenir à convaincre de son futur talent des artistes dont les motivations professionnelles varient en fonction de leur conception propre du métier, de leur sensibilité artistique ?
Les critères de sélection ne sont pas franchement définis et le postulant va devoir convaincre des personnalités totalement différentes.
Les jurés retiendront-ils le charisme d’un candidat, sa sensibilité, l’aisance à s’exprimer, le bagout de celui qui est sûr de lui ou les bonnes questions que se pose encore celui qui se cherche et attend de l’école qu’elle fasse le tri dans ses hésitations.
Certains se demandent : » Comment était Cronenberg à 20 ans ? »
On ne devient pas réalisateur de film ou scénariste comme on devient fonctionnaire, bibliothécaire ou mathématicien.
Il y a cinquante ans les métiers du cinéma, du théâtre étaient classés comme des activités de saltimbanques. Eric Rohmer n’a-t-il pas caché à sa mère, toute sa vie durant, qu’il était réalisateur de films en prenant un pseudonyme et en n’apparaissant jamais à l’image ? Elle l’a cru professeur de lettres classiques même si au moment de sa mort, il venait de connaître la consécration avec « Ma nuit chez Maud »…
Or, aujourd’hui, les professions du cinéma ont gagné en prestige et si une hiérarchie existe et si la réalisation de films reste la spécialisation la plus en vue, l’écriture du scénario, le montage, la production, la distribution, l’exploitation des salles font partie d’une chaîne de professions qui constituent un ensemble dont chaque maillon a son importance dans l’élaboration et l’histoire d’un film.
Le film de Claire Simon lève le voile sur les locaux de la FEMIS, sur le fonctionnement du concours et sur les conditions aléatoires d’admission. Il est difficile à partir des entretiens que montre le film de déterminer pour les candidats la meilleure façon de séduire un jury. Les sensibilités artistiques des jurés varient selon l’individu, sa conception de la profession et selon des critères personnels qui restent difficiles à définir…
Les films documentaires de Claire Simon sont toujours passionnants quel que soit le sujet abordé
et il n’est pas nécessaire de s’être interrogé sur le concours d’entrée à la FEMIS pour s’attacher à son nouveau film.
Francis Dubois
Des militants partagent ici des critiques littéraires, musicales, cinématographiques ou encore des échos des dernières expositions mais aussi des informations sur les mobilisations des professionnels du secteur artistique.
Des remarques, des suggestions ? Contactez nous à culture@snes.edu