Vincent vient de passer vingt-trois années en prison pour l’assassinat d’un homme qui avait humilié son père.
Il a obtenu pour les dix mois qu’il lui reste à purger, un aménagement de peine sous le contrôle d’un bracelet électronique.
Il est accueilli chez son cousin Didier, un agriculteur qui voue à sa mère une haine profonde depuis le suicide de son père.
Celle-ci qui, lorsqu’elle apprend qu’elle est condamnée par la maladie, décide de faire un testament dans lequel elle déshérite Didier.
Or, Didier est très attaché à la maison de famille qui, dans ce cas, lui échapperait.
Le film de Thibault Dentel raconte l’histoire de ces deux hommes. Le premier devant affronter la réalité d’une demi-liberté et l’autre, la perversité d’un chantage morbide.
A l’origine du projet de « La danse des accrochés », il y a l’écriture d’un documentaire sur le « placement sous surveillance électronique » (PSE).
En découvrant la réalité de cette possibilité d’écourter l’enfermement carcéral, il en mesure la portée sociale et sociétale et entrevoit très vite la possibilité de réaliser un long métrage sur le sujet.
Thibault Dentel appartient à la catégorie des « francs-tireurs » du cinéma. Ces réalisateurs qui, n’obtenant aucun financement sur la présentation de leur projet, raclent les fonds de tiroirs et deviennent leur propre producteur.
« La danse des accrochés » est né de sa ténacité et de nombreuses complicités artistiques et techniques.
Et pourtant, rien, à aucun moment, ne vient trahir le manque de moyens et la modestie de la production.
Thibault Dentel filme avec un visible plaisir et une efficace simplicité ses personnages vrais, chaleureux, émouvants, drôles (les dialogues très écrits sont savoureux), les amples paysages de la campagne vendéenne et les travaux des champs avec une justesse jubilatoire.
Un noir et blanc profond ajoute à l’authenticité de l’ensemble.
Tout cela se relâche légèrement au moment où le récit bifurque vers le genre policier à partir de l’élaboration d’un crime parfait où réalisme et burlesque se côtoient, peuvent surprendre, mais finissent par faire « bon ménage ».
Il fallait de l’audace pour, aux trois quarts du récit, prendre soudain cette direction inattendue et la mener frontalement. C’est un tour de force d’y être parvenu et d’avoir ajouté du plaisir au plaisir en cassant le rythme et en basculant dans ce qui, sans le talent de conteur du réalisateur, aurait pu devenir grotesque ou invraisemblable.
« La danse des accrochés » que de façon injuste, aucun festival n’a voulu inscrire à sa programmation, vaut dix fois mieux que des réalisations poussives à qui on ouvre des grands circuits de salles.
Aussi, si le film de Thibault Dentel est projeté à proximité, il ne faut pas hésiter un seul instant et y aller. Au final, on aura vu un bon film, apprécié d’excellents comédiens, fait circuler le bouche à oreille et encouragé un réalisateur qui le mérité largement à nous proposer très vite un prochain film qu’on attend déjà avec impatience.
Francis Dubois
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