Far’Houk est un jeune rappeur de 20 ans dont les succès de scène grandissants provoquent des jalousies.
Suite à un sombre règlement de comptes au cours duquel il a failli être abattu, il doit quitter Paris, le temps de se faire oublier.
Son producteur récemment converti à l’islam et qui se fait désormais appeler Bilal, lui propose de servir de chauffeur à son père Serge, un ancien maçon et peintre amateur qui a comme projet d’entreprendre un tour de France sur les traces de Joseph Vernet, une peintre du XVIIIème siècle à qui le Roi Louis XV avait commandé des tableaux représentants des paysages portuaires aux quatre coins du pays.
Malgré la différence d’âge et le choc des cultures, malgré les a-priori racistes et les amalgames, un rapprochement improbable va se produire entre le jeune rappeur d’origine maghrébine et ce vieil artisan du nord de la France bougon et raciste.
Après « Rengaine » un premier long métrage remarqué par la critique et sélectionné dans la section ACID de Cannes en 2012, l’ancien boxeur Rachid Djaïdani réalise en 2015, « Tour de France » porté par l’appui d’une productrice et par la présence, au générique, du nom de Gérard Depardieu.
Si le jeune cinéaste débordant d’énergie dans sa première réalisation s’est, cette fois sensiblement assagi, il reste débordant d’imagination, d’inventivité.
La trame de « Tour de France » est plutôt classique. Le récit narre la rencontre de deux personnages en total contraste par l’âge, les idées, la culture, qui finissent pas se rapprocher et par nouer de vrais liens.
La caméra de Rachid Djaïdani, à chaque seconde en éveil, sait saisir les regards, les gestes, les moments de solitude ou de méfiance, un détail de décor, la houle ou le détail d’un feuillage sans jamais s’attarder, sans jamais tomber dans le procédé ou l’épanchement.
C’est ce foisonnement de la mise en scène, la générosité des personnages pris dans un remous de tendresse qui sont enthousiasmants et qui font qu’entre le retraité bougon, imprévisible plutôt misanthrope qui fait le tour des ports de France sur les traces du peintre Joseph Vernet, et le jeune garçon qui, plus prosaïquement, a fui Paris pour sauver sa peau, une amitié va naître, une tendresse dont ils semblent eux-mêmes surpris.
Enfin sortis indemnes de multiples menaces de rupture, les deux larrons vont finir par céder à la force de leurs sentiments et déposer les armes.
La force de l’écriture de Rachid Djaïdani relayée par une mise en scène pudique, est d’échapper à toute forme de « discours ». Et tout se passe comme si la bienveillance dont le jeune réalisateur enveloppe ses personnages les protégeait de toute dérive réductrice.
Gérard Depardieu est parfait quand il se surprend en flagrant délit de tendresse et Sadek, le rappeur idéaliste qui lui donne la réplique est à la hauteur de son partenaire.
Ce road-movie est un vrai régal.
Francis Dubois
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