Petr et Bambas sont deux vieux amis. Ils se sont connus au Conservatoire de musique quand ils étaient jeunes gens.

Aujourd’hui soliste violoncelliste à Prague, Petr profite de sa venue dans la ville de province où son ami est directeur d’une école de musique pour le retrouver.

Petr est venu en compagnie de sa jeune amie.

Bambas accueille le couple dans sa maison où il vit avec sa femme, ses jeunes enfants et ses beaux-parents.

« Éclairage intime » traite, à partir des menus événements qui surviennent, le court séjour de Petr et de son amie dans la petite ville.

Avec ses amis Milos Forman et Karel Vachek (beaucoup moins connu), Ivan Passer était, dans les années 60, un des grands représentants de la nouvelle vague tchèque.

A sa sortie, en 1965, «  Éclairage intime  » est considéré par la critique française et par l’Amérique, comme un des plus beaux films de ce courant et un des moments marquants de l’Histoire du cinéma.

 » Éclairage intime  » qui est réédité aujourd’hui en copie rénovée, fait suite à la sortie de «  Cutter’s Way » chez Carlotta en 2014. Deux films qui représentent les œuvres-phares du cinéma de l’Est de l’époque.

cinéma : Eclairage intime
cinéma : Eclairage intime

Le film d’Ivan Passer est à la fois libre et mesuré quand il fait entrer l’improvisation et l’humour de façon subtile et plus intérieure, de sorte que les événements les plus mineurs, les plus ordinaires qui ponctuent le récit se remplissent de sens et apparaissent comme des temps forts. Un fou-rire incompressible, un échange de regards, l’invasion d’une colonie de poules dans un étroit garage, une scène à table, un cortège d’enterrement sont agrandis aux dimensions de véritables « clous » narratifs.

 » Éclairage intime « , comme souvent chez Passer exaltent trois valeurs en les pratiquant : l’humour, l’érotisme, la révolte.

L’humour, moins spectaculaire chez Passer que chez Forman, n’en partage pas moins avec celui-ci un regard très « Europe de l’Est » : regard à la fois compréhensif et lucide, parfois poussé jusqu’au cynisme quand il perce à jour l’absurdité de l’homme et de sa destinée et de sa capacité à accéder à la jouissance.

L’érotisme est traité chez Passer sans précaution ni préalable, même s’il le traite avec autant d’invention que de justesse.

Quant à la révolte, elle s’invite d’autant plus naturellement dans l’univers de Passer qu’elle se confond chez lui plus qu’avec une volonté militante, avec une dimension poétique qui semble innée chez chaque être. La révolte convertit en acte le décalage entre la vie quotidienne et le désir d’ailleurs.

A quoi tient qu’ «  Éclairage intime  » qui n’est qu’un regard posé sur un quotidien étroit, sur des personnages ordinaires, intéresse et passionne. C’est peut-être que ce qu’on voit à l’image n’est que la partie visible de l’iceberg, que derrière un déroulement anodin des choses, on peut détecter l’état d’un pays et de son peuple.

Et que cet « état des lieux » en filigrane donne au film toute sa consistance.

Le raffinement d’Ivan Passer n’a d’égal que sa simplicité. Ce cinéaste des ambiguïtés, du cynisme tonique, de la révolte tendre, de l’érotisme épidermique et abyssal est à redécouvrir absolument..

La photographie, le noir et blanc sont superbes.

Francis Dubois


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