« Sans automne, sans printemps » dresse, à travers les méandres de la vie de quelques jeunes gens appartenant à la classe moyenne de la ville de Guayaquil en Équateur, le portrait d’une génération qui vit dans l’errance et le désenchantement.
Le film consiste en un enchaînement d’histoires non linéaires qui ont des liens entre elles et où les différents protagonistes se croisent soit à l’intérieur du fonctionnement des couples soit à la périphérie des histoires amoureuses.
Lucas, l’étudiant en droit qui croit en ses propres utopies qu’il nomme « anarchie de l’imagination » est devenu dépendant aux somnifères.
Paula vend des comprimés de drogue à travers la ville. Elle a été très atteinte par l’absence de son père et par son expérience de la douleur.
Il reste peu de temps à vivre à Antonia quand Martin, son ex, revient à Guayaquil après huit ans d’absence en compagnie de Gloria, sa nouvelle fiancée.
Il va se créer un triangle amoureux dont personne ne connaît les limites.
Rafa, un jeune entrepreneur auquel tout pourrait réussir déteste son travail et s’apprête à clore sans ménagement sa relation avec Anna qui développe une attraction obsessionnelle pour ses voisins Sofia et Manuel au point de manipuler leur relation.
Cet enchevêtrement d’intrigues est à la fois une fresque sur le bonheur, l’insoumission, l’évasion l’amour, le portrait d’une génération et celui de la ville de Guayaquil pour laquelle, sans doute parce qu’il y a grandi et vécu, Ivan Mora Manzano montre un fort attachement.
Il y filme les lieux et, au fil des intrigues, les atmosphères, d’une caméra fluide et « caressante ».
Quant à la construction du film, elle jongle dans une grande fluidité avec les relations directes ou périphériques entre les protagonistes et une suite de narrations souvent tronquées comme inabouties. Un parti pris agréablement frustrant qui laisse au spectateur le champ libre pour combler les vides et les ellipses.
Une scène dans le film montre un enfant récupérant dans l’eau courante d’un caniveau les pièces d’un puzzle grâce auxquelles il reconstitue partiellement un portrait.
Ce moment reflète parfaitement l’œuvre d’Ivan Mora Manzano qui déroute parfois, dont on ne sait pas au cours de la projection dans quelles dispositions on en ressortira à son égard.
Mais une sorte de magie se produit de façon souterraine. Elle opère le collage de séquences qui apparaissaient disparates et peu propices à composer un vrai récit et qui pourtant, distille un trouble léger et persistant .
Il est rare de voir sur nos écrans, un film équatorien. Celui-là plaira aux spectateurs friands de films hors des sentiers battus dont la singularité est qu’elle laisse le spectateur à mi-chemin entre plaisir et frustration…
Francis Dubois
Des militants partagent ici des critiques littéraires, musicales, cinématographiques ou encore des échos des dernières expositions mais aussi des informations sur les mobilisations des professionnels du secteur artistique.
Des remarques, des suggestions ? Contactez nous à culture@snes.edu