Carole Wiesweiller a connu Jean Cocteau alors qu’elle était encore une enfant.
Le poète vécut plusieurs années chez sa mère, Francine Weisweiller à Paris, Place des États-Unis, mais aussi dans la somptueuse villa Santo Sospir qui dominait la baie de Villefranche à Saint-Jean-Cap-Ferrat.
Malgré l’écart de l’âge, une amitié naquit entre Cocteau et Carole qui s’assortit, avec le temps, d’une grande complicité, et qui ne se démentit jamais jusqu’à la disparition du poète en 1963 dont la jeune fille fut très affectée.
« Je l’appelais Monsieur Cocteau » retrace, à travers ses souvenirs qu’elle évoqua dans son ouvrage éponyme paru aux Éditions Michel de Maule, les dernières années, peut-être les plus riches, de celui qu’on appela le Prince des poètes.
Sur un plateau presque nu, dans un décor simple dont les éléments (un fauteuil, une table en rotin, une échelle double) seront peu utilisés par les comédiens, les lumières et les effets de transparence apportent une dimension légèrement fantasmagorique à la présence sur scène d’un Jean Cocteau jeune et intemporel interprété par un comédien qui déjoue tout penchant à la nostalgie ou à la mélancolie et qui, au contraire, joue la carte de la jovialité espiègle.
Les souvenirs évoquent au passage les personnages de Picasso, de la comédienne Nicole Stéphane qui fut l’interprète de « Les enfants terribles « , le tournage du film auquel Carole assista alors qu’elle était enfant.
L’évocation est légère et tendre pour restituer au plus juste le personnage d’un Cocteau modeste et généreux que les accrocs de la vie blessaient au plus profond et rendre tout ce qu’il aura fallu de tendresse et d’attachement pour que cette rencontre improbable entre une gamine et le poète devînt cette longue et fidèle amitié.
Bérangère Dautun est une Carole Wiesweiller vieillissante, toute de délicatesse et de raffinement. Elle contrôle avec beaucoup d’élégance l’évocation afin qu’elle ne devienne jamais ni une indiscrétion, ni matière à un excès d’émotion.
Est-ce que dans les circonstances actuelles, face aux difficultés auxquelles se heurtent les petites structures théâtrales, ces formes de création modestes et sincères de la tenue de « Je l’appelais Monsieur Cocteau » ne servent pas mieux le théâtre que les grosses machines à fort budget dont on fait une vitrine trompeuse ?
Et même si les deux sont sans doute nécessaires, reconnaissons la ténacité, le courage de ces petites troupes anonymes qui font un travail de fourmi et qui compensent leur « pauvreté » par de l’inventivité et beaucoup d’énergie.
Francis Dubois
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