Élisa est kinésithérapeute. Elle est mariée à Alex et mère d’un garçon d’une dizaine d’années, Noè.
Par nécessité professionnelle, elle doit quitter provisoirement Paris pour aller vivre dans le nord de la France.
Son installation à Dunkerque est-elle le fruit du hasard ou bien Élisa, née sous X dans cette ville, a-t-elle souhaité y séjourner pour entreprendre des recherches sur sa mère biologique qui a toujours refusé de dévoiler son identité ?
Plus ses recherches sont difficiles, plus elle se heurte à des obstacles administratifs et moins Élisa ne se résigne à renoncer.
Ce ne sera pas son obstination à lever le voile qui feront aboutir ses recherches, mais le jeu du hasard qui mettra en présence la jeune femme et sa mère par pure coïncidence.
C’est par hasard qu’Annette, assistante dans la cantine scolaire où Noé déjeune chaque jour , va consulter Élisa quand, à la suite d’une chute, elle souffre de douleurs dorsales.
Les deux femmes ne savent pas qui elles sont l’une pour l’autre et la bonne idée du scénario est de les avoir mises en contact dans un cabinet de kinésithérapie où la relation entre le soignant et le soigné passe essentiellement par le toucher du corps.
Il y a dans les séances de massage, dans le contact des mains d’Élisa sur la peau d’Annette, au- delà d’un contact charnel, une sorte d’apprivoisement l’une à l’autre qui leur permet de déceler les signes d’une complicité, une nécessité à se retrouver chaque semaine, pour une nouvelle séance de soins.
L’attachement d’Annette à Noé au moment où ils se côtoient à la cantine, tout instinctif, est un signe supplémentaire, un élément de plus pour que se tisse entre les trois personnages, une souterraine parenté.
Ounie Leconte construit son récit comme un château de cartes, comme une pyramide fragile qui risque, au moindre faux mouvement, de s’effondrer.
Le passé d’Annette est enfoui dans un secret familial verrouillé. Le père d’Élisa était un ouvrier algérien avec qui elle a perdu tout contact par la suite mais auquel elle est restée attachée et dont elle préserve comme elle le peut, le souvenir.
Et c’est la ressemblance de Noè avec ce grand-père fantôme qui sera l’élément déterminant pour qu’Annette, libérée d’un secret, finisse par franchir la frontière des interdits familiaux, l’autorité d’une mère qui a sans doute toujours décidé pour elle, la couardise d’un père commerçant, sensible à l’opinion publique.
L’histoire est belle. Le film est magnifique, superbement « tissé » avec une délicatesse qui n’a d’égal que l’interprétation toute en retenue mais resplendissante de Céline Salette qui trouve ici son plus beau rôle, la manière de photographier magistrale de Caroline Champetier qui nous donne envie de passer sans attendre par Dunkerque…
Anne Benoît est parfaite en femme vieillissante fragile mais on pourrait citer tous les comédiens et donner une mention spéciale au tout jeune Elyes Aguis qui, dans le rôle de Noé, est bouleversant.
Francis Dubois.
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